Petite histoire de la représentation cartographique

Petite histoire de la représentation cartographique

Petite histoire de la représentation cartographique

Laurence Dierickx
23 juillet 2018
L’histoire de la cartographie trouve ses origines dans l’Antiquité. Cette pratique – entre art et sciences - s’est développée à partir du 15e siècle et a connu d’importantes évolutions au 19e siècle, avec l'essor de la cartographie statistique.

Représenter un territoire, un itinéraire, des données : le rôle de la carte est multiple et l’histoire de sa représentation remonte à l’Antiquité. La représentation cartographique évoluera jusqu’au 19e siècle, époque de l’essor de la cartographie statistique. Deux siècles plus tard, la sémiologie graphique des cartes sera définie par le cartographe Jacques Bertin, qui identifie plusieurs variables visuelles en fonction desquelles la lisibilité et la compréhension d’une carte peut être évaluée.

 

« La carte est la représentation d’un espace. C’est la transcription dans une image de phénomènes localisés et des relations qui se développent entre ces phénomènes » (Le Fur). La carte n’est pas neutre : « elle résulte d’une série de choix et souvent exprime un point de vue » (Le Fur). Et une bonne carte « demande le moins d’efforts dans un minimum de temps pour atteindre le but visé (Joly). Elle apporte « une réponse visuelle rapide et évidente. Une carte qui n’apporte pas de réponse visuelle instantanée est mal construite » (Le Fur).

Antiquité

La carte, mémoire des lieux

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Les premiers croquis cartographiques ont pour objectif la conservation de la mémoire des lieux et des itinéraires. Ils sont gravés sur des tablettes d’argile. Ci-contre, la carte babylonienne du monde (circa 700-500 AJC).


276-194 A.J.-C. : La carte d’Eratosthène

Le philosophe, mathématicien, poète et astronome grec Eratosthène de Cyrène établit « une carte du monde connu ».

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Circa 150 : La carte de Ptomélée

L’astronome et astrologue grec Claude Ptolémée réalise une carte du monde tel qu’il est connu à l’époque. La carte de Ptomélée servira longtemps de référence.

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L'empire romain

La Table de Peutinger

Les empereurs romains établissent des cartes, qui consistent en des itinéraires routiers de l’empire à l’usage des armées. Ci-contre, la Table de Peutinger (ou carte de Castorius), redécouverte en 1494, qui constitue une copie d’une carte romaine. Cette carte mesure 6 mètres de long et 30 cm de large.

 

Le Moyen-Âge

Mapa Mundi, la carte du monde

La représentation du monde est en forme de T (« Carte en T ») : la terre est circulaire et est symboliquement partagée en trois, évoquant la trinité catholique. Ci-contre, la Mapa Mundi du moine Beatus de Liébana (8e siècle). La Mapa Mundi d’Hereford (1280) est la plus ancienne carte imprimée du Moyen-âge.

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15e-16e siècle

Les cartes marines

Si les premières cartes marines datent du 8e siècle, elles deviennent plus précises au 15e siècle, grâce à de nouveaux outils de mesure. C’est la période des grandes explorations. Ci-dessous, la projection de Mercator en 1569.

projection de Mercator

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17e-18e siècle

Les cartes détaillées et à grande échelle

Les nécessités guerre et administration exigent des cartes détaillées et à plus grande échelle.
La carte de Cassini (ou carte de l’Académie) est la plus ancienne carte topographique de France (fin du 18e siècle). A la même époque, la projection de Lambert (ci-contre) – du nom du mathématicien mulhousien Johann Heinrich Lambert – propose un système de projection conforme (les méridiens sont des droites et les parallèles des arcs de cercle).

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19e-20e siècle

La cartographie statistique

Avec l’émergence de la cartographie statistique, se développent de nouvelles formes de représentations. Les cartes servent à visualiser des données (liées aux populations) sur un territoire déterminé. La première carte démographique apparaît en Prusse en 1828. La première carte statistique moderne – sur l’instruction populaire en France – est présentée deux ans plus tôt, en France, par Charles Dupin (ci-dessous, une des premières cartes choroplèthes dont il est l’auteur). De 1845 à 1870, l’ingénieur français Charles Joseph Minard réalise une série de cartes figuratives dans lesquelles il s’essaie à l’adaptation de nombreux procédés graphiques. Les codes de la cartographie statistiques quantitative comprennent les cartes choroplèthes (cartes thématiques sur lesquelles les régions apparaissent en couleur), les cartes par points, les cartes isoplèthes (zones séparées par des lignes et points) et les cartogrammes.

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La carte climatique

La première carte climatique est présentée en 1817 par le naturaliste allemand Alexander von Humboldt. Il utilise des courbes isothermes pour indiquer les variations de température.

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La courbe de Gauss

Autre révolution du 19e siècle : la courbe en cloche du mathématicien allemand Carl Friedrich Gauss, est appliquée aux cartes – la terre y apparaît comme un ellipsoïde aplati aux pôles.

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Théorie de la sémiologie graphique

Tandis que le développement de la photographie aérienne participe aux progrès enregistrés dans la réalisation de cartes, la pratique de la cartographie statistique se développe. En 1967, le cartographe français Jacques Bertin publie « La sémiologie graphique » (que l’on appellera plus tard « la graphique »), qui consiste en un catalogue de procédés graphiques organisés en sept variables rétiniennes (ou visuelles) : orientation, forme, couleur, grain, valeur, taille et dimension.


Cartographie assistée par ordinateur

A la même époque, la cartographie assistée par ordinateur fait ses débuts. Selon Joly, elle doit être considérée « comme un maillon d’une chaîne continue d’opérations qui, partant d’une récolte de données, se poursuit par un traitement statistique ou mathématique (…) et aboutit à la visualisation et/ou à la mémorisation sous forme cartographique des résultats obtenus. » Avec l’introduction de l’informatique, constate Le Fur, « la carte n’est plus un but mais un outil d’exploration des hypothèses et des données).

21e siècle

Mashups cartographiques

Avec le développement d’internet et des technologies de l’information, la représentation cartographique devient interactive. Un mashup cartographique est « un produit obtenu en prenant des données de géolocalisation, comme des adresses et des coordonnées, sur une carte et en les organisant par catégorie ou type d’information » (Briggs). La première expérience de mashup cartographique, en datajournalisme, est menée en 2005 par le journaliste-développeur américain Adrian Holovaty, qui cartographie le crime à Chicago à l’aide service Google Maps.